Plus de cinq ans après l’accident de Brétigny-sur-Orge, qui avait coûté la vie à sept personnes, un ancien cadre de la SNCF décrit les mois précédant l’accident de Brétigny.
Pour ce spécialiste, au vu des déficits humains et de moyens au début des années 2010, il ne fait aucun doute que «si la catastrophe n’avait pas eu lieu à Brétigny, elle aurait eu lieu ailleurs, à Étampes (Essonne) ou Juvisy (Essonne). Dans tous les cas, avec une forte présomption que ça tombe sur le périmètre de Paris-rive-gauche (PRG) (NDLR : en charge du sud Francilien).»
Car dans les années précédent Brétigny, «le manque d’agents de maintenance formés sur PRG était largement connu et documenté», selon le même. Avec des conséquences très concrètes sur l’infrastructure. «La semaine précédant le drame, Transilien s’était, par exemple, plaint de l’état des voies au même endroit, dans le sens province-Paris», se souvient Denis. À l’époque, comme encore souvent aujourd’hui, ces problèmes de maintenance entraînaient régulièrement l’application de limitations de vitesse, revenant «à faire circuler des Mercedes sur des chemins de champs».
«Notre culture du risque s’est étiolée»
Mais pas à Brétigny, où une telle limitation aurait pourtant dû, toujours d’après Denis, être mise en place. «Le problème, c’est que la pression pour réduire le nombre de ces limitations, qu’elle soit hiérarchique ou politique, était permanente», complète un de ses collègues. Plus globalement, «notre culture du risque s’est étiolée au fil des années, relève Denis. Quand un directeur me demandait de lever une limitation, je lui demandais de me l’écrire, car au final, c’est bien le chef d’établissement qui est responsable pénalement. Mais ça, les plus jeunes dans l’entreprise n’auraient pas osé le faire…»
Plus globalement, un autre cadre, déplore qu’à l’époque, les moyens de l’entreprise aient été focalisés sur la gestion de nouveaux projets, plus rentable économiquement et en termes d’image qu’une maintenance forcément gourmande en moyens, tout en restant par définition «invisible». «Il a malheureusement fallu Brétigny pour que l’on retire, dans la précipitation, des gens du développement pour les mettre à la maintenance, a constaté l’intéressé. Puis les principaux cadres concernés ont été promus. Comme si l’on avait voulu camoufler la mémoire de cet accident.»
Source : Le Parisien