Congé de deuil en cas de mort d’un enfant : quand LREM fait pire que le Medef


Le zèle pro-entreprises de la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, et de quelques députés LREM décomplexés, choque jusqu’au Medef, qui sait encore mesurer la frontière qui sépare le décent de l’indécent en politique. Jeudi, l’Assemblée nationale examinait une proposition de loi centriste qui voulait porter de cinq à douze jours le congé de deuil pour les parents en cas de décès d’un enfant. On sait que c’est une tragédie absolue. Que des pères et des mères deviennent des morts-vivants. Que d’autres s’accrochent à la vie uniquement parce qu’ils ont d’autres enfants. Cinq jours de répit, ce n’est «pas à la hauteur», a expliqué à ses collègues le rapporteur Guy Bricout (UDI-Agir), qui a défendu les «douze jours» pour aider «à reprendre pied».

Mais c’était sans compter Muriel Pénicaud et la députée LREM Sereine Mauborgne, qui ont transformé un sujet de société en une vulgaire discussion de marchands de paniers. «Ce congé, c’est 100 % payé par les entreprises», a pointé la ministre du Travail, histoire de relever le débat. Puis elle a entonné son habituel refrain sur «la petite entreprise», qui a bon dos pour justifier son opposition à ce texte. «Est-ce que c’est normal que ce soit la petite entreprise qui paye 100 % ça ?» a interrogé Muriel Pénicaud. «Quand on s’achète de la générosité à bon prix sur le dos des entreprises, c’est quand même un peu facile», a surenchéri Sereine Mauborgne. Les interventions de députés sur les bancs de droite et de gauche, appelant le gouvernement et sa majorité parlementaire à un peu d’«humanité», n’ont servi à rien. La proposition de loi a été rejetée. En quelques heures de débats, l’exécutif et sa majorité parlementaire ont donné raison aux Français qui les perçoivent comme arrogants, méprisants, dénués d’empathie, incapables d’écoute. Sans compter l’aspect totalement bidon de l’argument économique.

Chaque année, près de 4 500 jeunes meurent avant leur majorité en France. Un chiffre à rapporter aux 2,7 millions d’entreprises du pays. Et fort heureusement, ce n’est pas tous les mois, ni tous les ans, qu’il arrive qu’un salarié perde un enfant. C’est même très rare. Et lorsque cela se produit, le coût des sept jours supplémentaires de congé, prévus dans la proposition de loi rejetée, va de quelques centaines d’euros à 1 500 euros pour la plupart des salariés. Pas de quoi mettre en péril les entreprises, même les «petites».

Ne souhaitant pas être discrédité par le zèle comptable de la ministre du Travail et de la majorité LREM, le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, a demandé un nouveau vote sur la proposition de loi du groupe UDI-Agir. Si un nouveau scrutin devait avoir lieu, la majorité risque une défaite après le déshonneur.

Source : Libération